S
SULREN
Compagnon
Bonjour,
Pour contribuer à faire vivre la rubrique horlogerie de Usinages j’ai le plaisir de présenter une pendule qui me plait beaucoup et qui a été créée par un horloger dénommé Lemercier.
Elle est exposée au Musée des Arts et Métiers à Paris et elle est montrée en photo dans le dictionnaire Tardy des horlogers (photo ci-dessous).
Je cite le Tardy :
« Louis Lemercier. Le Mans. Rue du gué de Maulny, 1903. Rue d’Auray, 1920-37. Il fit des recherches sur le mouvement perpétuel, les horloges à billes, une horloge à roues carrées. Mort vers 1960 ».
Plusieurs particularités méritent d’être signalées :
1- Période d’oscillation du pendule :
On a l’impression en regardant la photo d’avoir un balancier de longueur normale allant de 15 à 25 cm comme sur un mouvement de Paris par exemple.
Si on calcule sa période par la formule T = 2 Pi Racine(L/g) on arrive à près de 1 seconde pour un pendule de 25 cm.
Or si on calcule la période d'oscillation par les nombres de temps des roues on arrive à quelque chose de tout à fait différent. Le rapport moyen de transmission des roues carrées sur un pignon oblong à un seul lobe est forcément de 4. On a donc un rapport moyen de 16 entre la rotation de l’axe de la roue des minutes et l’axe de la roue d’échappement. Comme la roue d’échappement à une quarantaine de dents et que l’axe des minutes fait un tour en 1 heure, on arrive à une période d’oscillation qui devrait tourner autour de 5,6 secondes. Un balancier de cette période aurait une longueur de 7,8 m ….et irait se balancer deux planchers au-dessous de celui supportant la pendule.
En réalité le balancier que l’on voit sur la photo n'est qu'une pièce de renvoi vers un pendule à fil de torsion qui se trouve à la partie basse de la pendule et qu'on a du mal à voir. Evidemment on obtient facilement avec un pendule de torsion une période de 5,6 secondes.
2- Avance / retard de l’aiguille des minute :
La roue d’échappement tourne d’un angle proportionnel au temps. A cause des roues carrées il n’est pas possible que l’aiguille des minutes tourne proportionnellement au temps. C’est le cas en moyenne sur une longue période, mais transitoirement cette aiguille subit des retards ou des avances par rapport à celle d’une pendule à roues rondes.
J’ai voulu calculer les écarts maxi.
J’avoue que j'ai bien ramé pour faire cet exercice. J'ai écrit un programme pour calculer l'angle de rotation de la roue des minutes par intégration de l'angle de rotation de l'axe de la roue d'échappement, suivie de l’intégration de l’angle de rotation de l’axe intermédiaire, et en utilisant dans les deux cas à chaque pas de l’intégration le rapport de transmission qui allait bien en fonction de la position du pignon sur la roue carrée.
J’ai fait l’hypothèse d’une variation du rayon primitif de la roue carrée dans un rapport de 1 à 1,2 entre le rayon qui arrive au milieu du côté du carré et le rayon qui arrive au milieu de l'arrondi du coin du carré. J’arrive à la conclusion que l’aiguille des minutes subit des fluctuations d'avance ou de retard qui peuvent atteindre 1,5 minutes par rapport à la position théorique qu'elle aurait si les roues étaient rondes. Je donne ci-dessous la courbe de ces fluctuations, qui se reproduisent à l’identique toutes les 15 minutes.
REMARQUE: Il y a une imperfection dans le raccordement des calculs d'intégration que je vais m'efforcer de résoudre et qui font que les deux extrémités de la courbe ne se raccordent pas. Elles devraient se situer sur l'axe du temps (axe des abcisses). Cela provient d'une imperfection dans la modélisation de la roue carrée. Mais cela ne change rien à la forme générale de la courbe, ni à l'amplitude de l'avance / retard.
J’ai le souci de ne pas dire de bêtises sur ce Forum réputé pour sa qualité technique (ici : smiley fayot) et sur lequel je ne voudrais pas dénoter. J’ai donc voulu confirmer ce que j’ai dit dans non précédent post par une autre simulation, faite sur Excel cette fois-ci.
J’ai pu utiliser Excel en simplifiant la modélisation du rapport de transmission entre pignons oblongs et roues carrées. C’est la formule indiquée sur l’image ci-dessous. Il en résulte quand même un tableur assez lourd, tout en étant de « taille humaine », mais précédé d’une analyse assez costaud(e).
J’aboutis à peu près aux mêmes conclusions que par les calculs fait en programmation avec simulation complète des roues carrées (mais avec l’imperfection que l’ai signalée et non encore corrigée).
Le recours à deux approches différentes et concordantes réduit le risque d’erreur, sans l’annuler toutefois, parce qu’une même erreur de raisonnement a pu être reconduite et fausser les deux approches.
Si c’était le cas j’espère qu’un membre de ce forum la détectera, soit par ses propres calculs faits avec de puissants outils de CAO, soit par l’étude de documents relatifs à cette pendule célèbre.
Si on prolonge la courbe on voit nettement qu’elle est composée d’un fondamental de période 15 mn et d’un harmonique d’ordre 4, c'est-à-dire de période 3,75 mn. La façon dont fondamental et harmonique se combinent et donc la « dentelle de la courbe » est influencée par les conditions initiales de l’intégration, c'est-à-dire par le calage du pignon de l’axe intermédiaire par rapport à la roue carrée portée par ce même axe. Je ferai d’autres simulations avec des calages différents pour voir l'évolution des formes.
3- Couple sur la roue d’échappement :
Si on traçait la courbe de couple sur l’échappement on arriverait à quelque chose de bien plus complexe que pour celle de l’aiguille des minutes et avec de réelles grosse bosses correspondant aux quatre côtés de la roue du barillet.
Sur une pendule normale le couple au niveau de la roue d’échappement décroit lentement dans le temps, au fur et à mesure que le ressort du barillet « se vide ».
Sur cette pendule il y aussi une décroissance régulière, mais à cette courbe se superpose une espèce de sinusoïde fondamentale de période 240 minutes.
A cette sinusoïde se superpose une espèce de sinusoïde de période 60 minutes.
A cette dernière se superpose encore une autre sinusoïde de période 15 minutes.
Enfin à cette dernière se superpose une sinusoïde de période 3,75 minutes.
La courbe de couple au niveau de la roue d’échappement est donc une courbe décroissante très tourmentée. Elle présente une grosse bosse de couple toutes les 4 heures quand le fondamental et ses trois harmoniques sont en conjonction haute. Deux heures après les bosses, elle présente un gros creux de couple, quand le fondamental et ses trois harmoniques sont en conjonction basse.
Le ressort du barillet est donc surdimensionné pour assurer le fonctionnement de l’échappement pendant les creux de transmission de couple.
Le surplus de force du ressort pour assurer pendant les creux n’est cependant peut-être pas si énorme, si on regarde la faiblesse des fluctuations des minutes par rapport à ce que l’intuition nous faisait croire. Le gros moment d’inertie d’un balancier à fil de torsion peut aussi aider, en continuant d’osciller longtemps sur sa lancée même en ne recevant que de faibles impulsions.
Pour contribuer à faire vivre la rubrique horlogerie de Usinages j’ai le plaisir de présenter une pendule qui me plait beaucoup et qui a été créée par un horloger dénommé Lemercier.
Elle est exposée au Musée des Arts et Métiers à Paris et elle est montrée en photo dans le dictionnaire Tardy des horlogers (photo ci-dessous).
Je cite le Tardy :
« Louis Lemercier. Le Mans. Rue du gué de Maulny, 1903. Rue d’Auray, 1920-37. Il fit des recherches sur le mouvement perpétuel, les horloges à billes, une horloge à roues carrées. Mort vers 1960 ».
Plusieurs particularités méritent d’être signalées :
1- Période d’oscillation du pendule :
On a l’impression en regardant la photo d’avoir un balancier de longueur normale allant de 15 à 25 cm comme sur un mouvement de Paris par exemple.
Si on calcule sa période par la formule T = 2 Pi Racine(L/g) on arrive à près de 1 seconde pour un pendule de 25 cm.
Or si on calcule la période d'oscillation par les nombres de temps des roues on arrive à quelque chose de tout à fait différent. Le rapport moyen de transmission des roues carrées sur un pignon oblong à un seul lobe est forcément de 4. On a donc un rapport moyen de 16 entre la rotation de l’axe de la roue des minutes et l’axe de la roue d’échappement. Comme la roue d’échappement à une quarantaine de dents et que l’axe des minutes fait un tour en 1 heure, on arrive à une période d’oscillation qui devrait tourner autour de 5,6 secondes. Un balancier de cette période aurait une longueur de 7,8 m ….et irait se balancer deux planchers au-dessous de celui supportant la pendule.
En réalité le balancier que l’on voit sur la photo n'est qu'une pièce de renvoi vers un pendule à fil de torsion qui se trouve à la partie basse de la pendule et qu'on a du mal à voir. Evidemment on obtient facilement avec un pendule de torsion une période de 5,6 secondes.
2- Avance / retard de l’aiguille des minute :
La roue d’échappement tourne d’un angle proportionnel au temps. A cause des roues carrées il n’est pas possible que l’aiguille des minutes tourne proportionnellement au temps. C’est le cas en moyenne sur une longue période, mais transitoirement cette aiguille subit des retards ou des avances par rapport à celle d’une pendule à roues rondes.
J’ai voulu calculer les écarts maxi.
J’avoue que j'ai bien ramé pour faire cet exercice. J'ai écrit un programme pour calculer l'angle de rotation de la roue des minutes par intégration de l'angle de rotation de l'axe de la roue d'échappement, suivie de l’intégration de l’angle de rotation de l’axe intermédiaire, et en utilisant dans les deux cas à chaque pas de l’intégration le rapport de transmission qui allait bien en fonction de la position du pignon sur la roue carrée.
J’ai fait l’hypothèse d’une variation du rayon primitif de la roue carrée dans un rapport de 1 à 1,2 entre le rayon qui arrive au milieu du côté du carré et le rayon qui arrive au milieu de l'arrondi du coin du carré. J’arrive à la conclusion que l’aiguille des minutes subit des fluctuations d'avance ou de retard qui peuvent atteindre 1,5 minutes par rapport à la position théorique qu'elle aurait si les roues étaient rondes. Je donne ci-dessous la courbe de ces fluctuations, qui se reproduisent à l’identique toutes les 15 minutes.
REMARQUE: Il y a une imperfection dans le raccordement des calculs d'intégration que je vais m'efforcer de résoudre et qui font que les deux extrémités de la courbe ne se raccordent pas. Elles devraient se situer sur l'axe du temps (axe des abcisses). Cela provient d'une imperfection dans la modélisation de la roue carrée. Mais cela ne change rien à la forme générale de la courbe, ni à l'amplitude de l'avance / retard.
J’ai le souci de ne pas dire de bêtises sur ce Forum réputé pour sa qualité technique (ici : smiley fayot) et sur lequel je ne voudrais pas dénoter. J’ai donc voulu confirmer ce que j’ai dit dans non précédent post par une autre simulation, faite sur Excel cette fois-ci.
J’ai pu utiliser Excel en simplifiant la modélisation du rapport de transmission entre pignons oblongs et roues carrées. C’est la formule indiquée sur l’image ci-dessous. Il en résulte quand même un tableur assez lourd, tout en étant de « taille humaine », mais précédé d’une analyse assez costaud(e).
J’aboutis à peu près aux mêmes conclusions que par les calculs fait en programmation avec simulation complète des roues carrées (mais avec l’imperfection que l’ai signalée et non encore corrigée).
Le recours à deux approches différentes et concordantes réduit le risque d’erreur, sans l’annuler toutefois, parce qu’une même erreur de raisonnement a pu être reconduite et fausser les deux approches.
Si c’était le cas j’espère qu’un membre de ce forum la détectera, soit par ses propres calculs faits avec de puissants outils de CAO, soit par l’étude de documents relatifs à cette pendule célèbre.
Si on prolonge la courbe on voit nettement qu’elle est composée d’un fondamental de période 15 mn et d’un harmonique d’ordre 4, c'est-à-dire de période 3,75 mn. La façon dont fondamental et harmonique se combinent et donc la « dentelle de la courbe » est influencée par les conditions initiales de l’intégration, c'est-à-dire par le calage du pignon de l’axe intermédiaire par rapport à la roue carrée portée par ce même axe. Je ferai d’autres simulations avec des calages différents pour voir l'évolution des formes.
3- Couple sur la roue d’échappement :
Si on traçait la courbe de couple sur l’échappement on arriverait à quelque chose de bien plus complexe que pour celle de l’aiguille des minutes et avec de réelles grosse bosses correspondant aux quatre côtés de la roue du barillet.
Sur une pendule normale le couple au niveau de la roue d’échappement décroit lentement dans le temps, au fur et à mesure que le ressort du barillet « se vide ».
Sur cette pendule il y aussi une décroissance régulière, mais à cette courbe se superpose une espèce de sinusoïde fondamentale de période 240 minutes.
A cette sinusoïde se superpose une espèce de sinusoïde de période 60 minutes.
A cette dernière se superpose encore une autre sinusoïde de période 15 minutes.
Enfin à cette dernière se superpose une sinusoïde de période 3,75 minutes.
La courbe de couple au niveau de la roue d’échappement est donc une courbe décroissante très tourmentée. Elle présente une grosse bosse de couple toutes les 4 heures quand le fondamental et ses trois harmoniques sont en conjonction haute. Deux heures après les bosses, elle présente un gros creux de couple, quand le fondamental et ses trois harmoniques sont en conjonction basse.
Le ressort du barillet est donc surdimensionné pour assurer le fonctionnement de l’échappement pendant les creux de transmission de couple.
Le surplus de force du ressort pour assurer pendant les creux n’est cependant peut-être pas si énorme, si on regarde la faiblesse des fluctuations des minutes par rapport à ce que l’intuition nous faisait croire. Le gros moment d’inertie d’un balancier à fil de torsion peut aussi aider, en continuant d’osciller longtemps sur sa lancée même en ne recevant que de faibles impulsions.